Le 26 mai 1944, dans la matinée, les B-17 américains, bombardiers lourds appartenant à la cinquième escadre de bombardement de la 15e Armée de l'Air, basée en Italie, larguaient leurs bombes sur Saint-Etienne. Au minimum 1392 bombes d'après les recherches de Marc Swanson, auteur d'un ouvrage sur le sujet en 2005. Le bombardement dura vingt minutes. Il fit un millier de morts - la ville de Saint-Etienne commanda 970 cercueils - et entre 1500 et 2000 blessés. Huit enseignants et vingt-quatre enfants furent tués dans l'école de Tardy. Le nombre de sinistrés avoisine les 20000. D'après un compte rendu récapitulatif officiel de la Défense Passive, cité par Marc Swanson, 230 bâtiments furent entièrement détruits. Le 6 juin 44, jour du débarquement de Normandie, le Maréchal Pétain était à Saint-Etienne...

Extrait du discours prononcé en 2014 par le maire de Saint-Etienne:
" Mesdames, Messieurs, Vendredi 26 mai 1944. C'est une matinée d'été comme une autre. Chacun vaque dans les rues de Saint-Étienne à ses habitudes et les enfants sont à l'école. Les rumeurs d'une fin prochaine de la guerre se font entendre de plus en plus et l'espoir s'installe. Radio Londres, qu'on écoute sur son poste à galène, dans l'obscurité de la chambré, délivre en effet des messages personnels mystérieux à l'endroit de la résistance. Nul ne se doute à cet instant que le destin des stéphanoises et de stéphanois s'est décidé à Londres, le 25 mars 1944, lors de la préparation du débarquement des alliés en Normandie. Le « transportation plan » indique sur ses cartes la gare de Châteaucreux et sa rotonde, la gare de triage du Pont de l’Âne et la voie ferré en direction du Puy : Il s'agit de détruire les infrastructures de chemin de fer, notamment les gares de triage comme celle de SaintEtienne, afin d'empêcher l'armée allemande d'acheminer des troupes et du matériel vers l'ouest de la France.
10 heures. Les horloges des églises carillonnent lorsque les sirènes de la défense passive prennent la relève. Encore une alerte pour rien pensent les stéphanois ! Les zones de combats sont bien loin de la Loire... pourquoi s’inquiéter ?
10h17. 176 bombardiers américains B-17, s'approchent de la gare de Châteaucreux. Les stéphanois lèvent la tête pour apercevoir les avions qui volent à haute altitude afin échapper aux tirs de la DCA. Les premières bombes tombent. Dans les rues, c'est le chaos, la panique. En trois vagues, 450 tonnes de bombes sont lâchés. La première vague a produit tellement de fumée que les B-17 suivants lâchent leurs bombes un peu partout.
10h35. Fin de l’alerte. En 18 longues minutes, Saint Etienne vient de connaitre en son cœur les horreurs d’une guerre aveugle et meurtrière, un enfer absolu à quelques semaines de la libération de Saint-Etienne. Le bilan humain est terrible. Près de 1000 morts dont 24 élèves et 8 maîtres de l'école primaire de Tardy, 2000 blessés, 20 000 sinistrés. Les objectifs militaires ont été détruits mais à quel prix... Près de 800 immeubles dont 250 sont détruits. Les quartiers du Soleil, de Tardy, de la Cotonne, le jardin des Plantes et même l’église Saint-François sont gravement touchés. 70 ans, jour pour jour, après ce drame douloureux pour Saint-Etienne, nous sommes réunis tous ensemble pour nous recueillir, pour nous souvenir (...).
Oui,Mesdames, Messieurs, tout Saint-Étienne se souvient aujourd’hui de ses martyrs dans un seul et unique élan du cœur afin de ne jamais oublier le sacrifice de ces stéphanoises et stéphanois, à quelques semaines de la délivrance. Pour se souvenir, aussi, que nous vivons désormais dans une Europe en paix, qui a permis la réconciliation entre les peuples et détruit des murs. Au lendemain des élections européennes, ce message prend une force incroyable, tant les dangers sont à nos portes, comme jamais, en ce début du 21ème siècle, avec des discours aux relents nauséabonds. Je terminerais mon propos par cette pensée d’Albert Einstein qu’il nous faut méditer encore et encore : "Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire". Merci."



Dessins de l'artiste Pierre Zellmeyer, qui vécut cette journée tragique