Friday, June 02, 2023

Les Maisons sans escalier, à Saint-Etienne, sont assez connues. On peut les visiter lors des Journées du Patrimoine. Beaucoup moins le sont les autres immeubles de l'architecte qui les a conçues. Il s'agit d' Auguste Bossu (1889 - 1946) auquel Suzanne Vengeon a consacré un ouvrage à partir, entre autres, d'archives familiales.

NdFI : nous avions rencontré l'auteure de ce livre passionnant lors de sa sortie et publié un article. Cet article étant perdu, nous republions cette petite page, l'oeuvre d'Auguste Bossu le méritant. Les photos et illustration appartiennent à notre portail.

Une publicité dans La Région illustrée en septembre 1936

Le grand-oncle de Suzanne Vengeon est né à Saint-Etienne dans un milieu modeste l'année où était inaugurée la Tour Eiffel. Il a laissé à sa ville natale des immeubles d'un grand intérêt architectural. Novateur, il y a promu l'idée de la copropriété, à grand renfort de publicité, et participa même à l'élaboration d'une œuvre emblématique de la cité, à savoir le monument du Puits Couriot, inauguré en 1920. Si on retient à son sujet le nom du sculpteur, Paul Graf, il convient en effet de citer aussi Bossu et un autre architecte, François Clermont. Ce dernier, frère de l'écrivain Emile Clermont, avait déjà travaillé avec Auguste Bossu, son futur associé, sur un avant projet de programme de cité ouvrière pour la Société des mines de Montrambert, et avec Paul Graf sur le fameux Hôtel des Ingénieurs. Le trio se retrouva quelques années plus tard pour l'édification de la nouvelle préfecture de Clermont-Ferrand.

Pour ses deux Maisons sans escalier, autrement appelées « chalets Bizillon », réalisé l'un en 1933, l'autre en 1939, l'architecte s'est peut-être inspiré de la rampe hélicoïdale du garage de Fumet et Noiray, inauguré en 1932 à Grenoble. Concernant ses autres réalisations stéphanoises, parmi les plus marquantes, il y eut avant, l'Immeuble de la Tribune Républicaine, place Jean-Jaurès (cinéma Le Méliès aujourd'hui), mais surtout le Gutenberg, quartier Bellevue, et l'Immeuble moderne, à l'angle des rues Michelet et des Creuses.

Le Gutenberg mérite une petite visite. Comme l'écrit Suzanne Vengeon, on découvre « une structure complexe insoupçonnée » autour d'une cour triangulaire éclairée par une grande verrière. A partir de la cour, au centre de laquelle prend place un petit jardin minéral, on accède aux étages « par un système combiné d'escaliers et de couloirs-coursives, comme dans un bateau. » L'ensemble donne l'impression de pénétrer dans un village baigné dans une douce lumière.

L'Immeuble moderne, quant à lui, est ainsi nommé car il fut le plus moderne ou le plus révolutionnaire de Saint-Etienne. Le projet fut lancé en 1930 et l'immeuble de huit étages inauguré deux ans plus tard. Un journal le qualifia de « premier gratte-ciel stéphanois » et mentionnait le cubisme pour décrire son aspect rompant tellement avec les habitudes.

«  Comme toujours, écrit Suzanne Vengeon, Auguste Bossu est très sensible à l'avis de tous, même des non-spécialistes, à qui il s'adresse simplement, hors de tout jargon professionnel. Il organise des visites, il décrit, il explique la disposition du plan qui ramène les pièces d'habitation vers le midi et dont le hall rectangulaire dessert les différentes pièces sans aucune perte d'espace. Il explique aussi que les avancées des balcons sont calculées pour laisser passer le soleil l'hiver et arrêter ses rayons l'été lorsqu'il est au zénith (…). Les appartements, comme l'immeuble, sont de conception la plus moderne (…). L'isolation thermique et acoustique est assurée par le Solomite, panneaux épais de fibres végétales hachées et comprimées dans une presse hydraulique, jointes à des fils d'acier galvanisés et couvertes d'une couche de ciment, de plâtre ou de béton... ».

Une autre réalisation de Bossu, l'immeuble du 23 rue du 11 novembre, avec son étrange observatoire (1929). Immeuble alors équipé de vide-ordures par évier vidoir, chauffage central, ascenseur électrique, téléphone chez le concierge...

Pour en savoir +, lire Dans les pas de l'architecte Auguste Bossu de Suzanne Vengeon, C.A.P.U.C.I.N.E. (2012)