" L'homme vit en mille points où il n'habite pas "
Guizot cité par Michelet
(non remis à jour)
Dire que l'axe Paris - Lyon est l'un des plus importants de France est une vérité que le Seigneur Jacques II de Chabannes de la Palice n'aurait pas contestée. On peut dire qu'il est le plus important en le prolongeant jusqu'à Marseille (elle passe en fait par Aix), puisqu'il réunit les trois plus grandes villes de France. En remontant dans le temps, on comprend aussi qu'il est le plus chargé d'histoire: route de l'Italie d'où vint la Renaissance, route des Croisades, route de Rome et, pourquoi pas, de la Grèce... Aujourd'hui, beaucoup plus prosaïquement, c'est la route du Soleil et chacun sait que cet héliotropisme en fait le plus chargé de France dès que le Printemps vient ranimer les populations des contrées du Nord.
/M.Vialla
Riorges (photo publiée dans le guide de la route bleue en 1951). La N7, entre Paris et Menton, est souvent appelée la route bleue. Dans le Roannais, elle passe par Saint-Martin-d'Estréaux La Pacaudière Changy, Saint-Germain-Lespinasse, Roanne, Le Coteau, L'hopital sur Rhins, Neaux, St Symphorien de Lay, Fourneaux, Machezal. Mais la vraie Route Bleue, par la suite prolongée d'Aix à Marseille et de Paris à Amsterdam via Bruxelles, et sur un 3e tronçon vers Lille, négligeait Lyon. Elle traverse toute la Loire après Roanne sur l'actuelle D1082 , passe par Saint-Etienne, à mi chemin entre Paris et Nice et rejoint Bourg Argental, "la porte de la Méditerranée", lisons-nous parfois, avant la descente vers la grande bleue. Nous l'évoquons brièvement en parallèle de l'article de Mme Vialla. Précisions : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
Le canton de La Pacaudière, le plus septentrional du Roannais, offre un curieux mélange de plaines sillonées de routes antiques, de montagnes, d'étangs, de forêts. Ce fut toujours un lieu de passage du nord et du centre au midi: un pays frontière. En rentrant dans Saint-Martin d'Estréaux, le paysage fait contraste avec les plaines du nord de la France, on se trouve dans une contrée nouvelle. Les toitures plates aux tuiles rondes remplacent les hauts combles aigus: couleur, lumière, tout est méridional.
Antiquité
L'apport romain, dans notre canton, est indiscutable, même s'ils ont laissé plus de vestiges dans les grandes villes. Dans les Annales des Amis du Vieux Crozet et de La Pacaudière de 1983 (n°19) Madame Laurenchet nous donne le tracé des Voies anciennes dans notre contrée, dans son étude du Chemin Royal du Bourbonnais. Il est intéressant de noter que ces itinéraires sont liés au "Cursus Publicus", c'est à dire au service de la correspondance officielle civile et militaire créé par l'empereur Auguste. Sur la table itinéraire du monde romain au IIIe ou IVe siècle, dite Table de Peutinger (copie du XIIIe siècle), la voie la plus importante pour nous conduisait à Augustonementum (Clermont-Ferrand) et Gergovia ainsi qu'à Noviadunum (Nevers), Avaricum (Bourges) et Lutécia (Paris). C'était une des grandes voies d'alors, où sortie de Roanne par la porte d'or (enseigne d'une auberge) elle traversait le marais puis, à Saint Romain la Motte, rencontrait le tumulus de Guerine, la terre de Varenne, la terre des morts, passait au village des Athiaux et entrait à Ambierle aux lieux dits de la Croix blanche ou des Sorbiers pour longer le tumulus de la Marine, passer sur la levée de l'étang Machalat et continuer par Rullières, traverser la plaine et entrer à Changy. Elle passait ensuite la Tessonne au hameau de Marioglias (Marioles où la tradition localise lors des invasions barbares une bataille entre soldats romains et envahisseurs) où son trajet se marquait il y a peu de temps encore par les substructions d'un pont romain et de nombreux débris de tuiles à rebord, béton et poteries des terres voisines, notamment à la Varenne d'où la voie allait par la Chaise et Arçon pour se diriger sur Saint-Martin d'Estréaux et Torciacum (Tourzy) et gagner l'Allier. Cette route suivait donc à peu près la route actuelle de Paris à Antibes et la ligne ferroviaire de St Germain des Fossés.
Outre cette grande voie, chemin militaire, d'autres, plus étroites, appelées compendium par les Romains menaient d'un lieu à un autre: au village de Varenne, la voie principale se divisait en une branche qui s'éloignait vers Claynes, Vivans, Chenay, Urbise pour aller à Montaiguet.
A la fin du IIIe siècle, Ariolica est abandonnée par ses habitants. Le site était situé à une douzaine de lieues gauloises (2415 mètres) de Roanne et à 18 de Varennes, vraisemblablement au nord de la Pacaudière, sur les terres du Treillard où des fouilles ont été pratiquées, situation parfaitement en accord avec les distances indiquées sur la Table de Peutinger.
Par sa situation, le Forez était un lieu de passage entre la région méditerranéenne et la "France". Pour le Forez, l'axe essentiel est la route de la vallée de la Loire: le chemin du Forez. Quittant au Puy la grande voie de l'Allier, il suit la Loire jusqu'à Vorey, puis par Dignac, Usson, atteint Montbrison, Saint-Germain Laval, Villemontais, la Côte Roannaise, le Crozet, Saint Martin, Montaiguet, le Donjon et retrouve la route de Nevers.
La Pacaudière (Cartes postales: Toni P.)
La route des Postes
Vers 1470, Louis XI constitue au nord du comté de Forez, entre Nevers et Lyon, un nouvel itinéraire qui va se substituer au chemin lyonnais de la rive droite de la Loire passant par un itinéraire bourguignon. Le Roi crée les relais de Poste royale pour les courriers royaux. La première de ces routes postales fut celle de Paris à Lyon lorsque le Roi s'intéressait spécialement à la succession de Provence. Le premier maître de poste ou "chevaucheur du Roi" qui tint le relais de La Pacaudière fut vraisemblablement le Sieur Trembay, cité dans le terrier Papon de la Châtellenie de Crozet (1506). Les villes participaient aussi au fonctionnement du service: c'est ainsi que la ville de Nevers payait un des ses habitants pour ouvrir la porte la nuit aux Postes du Roi (Histoire générale des postes françaises d'Eugène Vaillé).
Notez l'indication "Poste" à Saint-Symphorien (carte de Cassini/dr)
En 1576, Henri III crée l'office de "Messager Royal" et en 1584, neuf grandes routes de poste sont à sa charge dont celle de Paris à Lyon par Moulins, La Pacaudière, Roanne, Tarare. Sous Henri III toujours, on comptait encore 13 passages de rivières à charge du Roi. On dénombre alors au total 252 maîtres de poste dont 27 entre Paris et Lyon d'après La Guide de Charles Etienne, éditée en 1552 sous le titre : "La Grand Guide des chemins pour aller et venir par tout le Royaume de France...". Les maisons de poste étaient établies toutes les 5 à 6 lieues. Elles sont gérées par un maître de poste ou écuyer propriétaire qui reçoit des gages mais est soumis à des règlements et obligations. Il a sous ses ordres des palefreniers et les postillons. La maison est souvent complétée par une auberge. En 1597 sous Henri IV et son ministre Sully, nommé Grand Voyer de France, la Poste aux chevaux s'ouvrit au public, ce qui modifia fondamentalement les conditions de circulation sur ces routes. L'action de Sully permit d'améliorer considérable leur état. Ce programme spécial d'investissement s'effondra ensuite sous la régence de Marie de Médicis et l'on ne trouve plus de telles dotations, même du temps du grand Colbert dont le travail acharné est célèbre. Le ministre de Louis XIV suivit par exemple avec attention la construction des ponts. Rappelons que celui de Roanne est ancien. Dans les rapports sur l'état du grand chemin du Bourbonnais (1668) une anecdote revient sur le passage de Richelieu en 1622 et évoque "en plusieurs endroits, chemins incertains. Trois ponts sur quatre rompus, le pont de Roanne, en charpente, inutilisable sur une moitié, emprunté par la litière du Cardinal Richelieu..." Le pont reconstruit allait de nouveau être emporté en 1680.
Jusqu'à Nevers et Moulins, l'itinéraire suivait très sensiblement la RN7 actuelle, et de Moulins à Roanne, il y avait peu de différence encore, sauf avant le col de Saint-Martin d'Estréaux où la route passait par la Tour. Au sud de Roanne, le voyage se corsait: "A l'Hospital sur Rhins, brigandage", disait la Guide.
De Lyon à Roanne, le premier carrosse public fut établi en 1686, permettant ainsi avec le coche d'eau de la Loire de faire tout le voyage de Lyon à Paris en transport collectif. Près d'un siècle plus tard, on voit passer les premières "turgotines", les diligences. En 1758, l'Almanach de Lyon indique qu'il a été établi, en été seulement, un carrosse à gondole à 14 places, allant à Paris par Tarare et Roanne. Il faisait le voyage de la capitale des Gaules à la capitale en 11 jours. En 1848, il faut une journée à la malle-poste pour faire le trajet de Paris à Lyon.
Entre temps sont nés les Ponts et Chaussées (1715) et l'Ecole des Ponts et Chaussées, par Trudaine (1747). La sécurité est assurée par la Maréchaussée. A La Pacaudière, elle est installée au Petit Louvre.
Grande route de Paris à Lyon par la Bourbonnois, indique la légende de la route sur la carte de Cassini (/dr)
Personnages illustres sur le grand chemin
L'Empereur germanique Sigismond, le 30 janvier 1416, est salué à son passage par Jean de Châteaumorand et les autres gentilhommes du pays. Le célèbre Jacques Coeur, grand argentier de Charles VII en décembre 1490 reçoit l'hospitalité à Châteaumorand. François Ier vint plusieurs fois et logea au château de Boisy. En 1523, à La Pacaudière fut arrêté l'évêque d'Autun, compromis dans le complot du connétable Charles III de Bourbon. En 1567, La Pacaudière servit de rendez-vous aux troupes protestantes du capitaine Poncenat, seigneur de Changy, qui fit régner la terreur. En 1618, venant de Genève, François de Sales s'arrête à Tarare avant de rejoindre Paris où Louis XIII l'a invité à assister au mariage de sa soeur Christine avec Victor Amédé, Prince de Piémont. Il logea et célébra l'office au château de Châteaumorand. C'est encore à la Pacaudière que Richelieu, en 1622, apprit de M. de Marillac, légat du Pape, sa nomination au cardinalat. L'année suivante, le 3 mars, le Prince de Condé passa la nuit à l'Auberge de la Teste noire à Saint-Symphorien de Lay. Le lendemain, il déjeuna à l'hostellerie de "L'image de Notre Dame" à La Pacaudière. En septembre 1632, Louis XIII traverse Roanne sans s'arrêter, en route vers le Languedoc avec son armée. Le cardinal Mazarin, Mme de Sévigné, la princesse Marie-Adélaide de Savoie (12 ans) et d'autres encore l'empruntèrent. En novembre 1804, à Changy, un arc de triomphe de verdure et de guirlandes fleuries est dressé en l'honneur des cortèges de cardinaux, évêques et dignitaires qui se rendent à Paris pour le sacre de Napoléon Ier. Et foule de soldats, reîtres, bagnards, pèlerins, mendiants, comme ceux qui se rendaient aux banquets offerts par le Prieur d'Ambierle à la Saint Martin le 11 novembre ou par le seigneur du Temple à Saint-Romain la Motte...
/dr
C'est encore au relais de la Tête-Noire (transformé en auberge vers 1860), un des plus anciens de France, que meurt le 9 janvier 1543, Guillaume du Bellay, seigneur de Langey. Son médecin, Rabelais, auteur de Pantagruel et Gargantua, l'embaume sur place. Le poète Joachim du Bellay, cousin du défunt, fit entrer le relai de poste dans la littérature:
" Triste et rongé du soing qui plus me nuict,
Pour le regret qui m'englace et m'allume,
Je retournis, sous l'hostellière plume,
Mes membres las sous l'horreur de la nuit..."
D'autres auteurs y auraient dormi dont Ronsard, Rousseau et même Molière et La Fontaine.
La Route bleue. Tracé publié dans le guide de 1951, édité par le Comité central de la Route bleue (Editions de l'Essor économique). L'appellation "Route bleue" est essentiellement de nature touristique. L'internaute trouvera sur la toile un site qui lui est entièrement consacré (lien en bas de page). Nous y lisons que le terme s'est répandu dès les années 1920 avant d'être officialisé une décennie plus tard. Elle eut ses grandes heures dans les années 50."Le but était notamment de ramener une partie du trafic de la N6 vers la N7, dans la partie nord du trajet." Elle passe par Balbigny, Feurs, Montrond-les-Bains et Saint-Etienne pour poursuivre vers le Pilat en empruntant la route des cyclotouristes. Cette route qui ouvrit au foyer industriel de Saint-Etienne l'accès du nord et du midi en évitant le détour par Lyon, explique L.J. Gras dans "Les routes du Forez", fut l'oeuvre principalement de l'Empire et de la Restauration. Un premier tracé avait été étudié dès 1795. L'Assemblée du "Département" de Roanne demandait déjà qu'il passe par Neulise et Feurs, et non Saint-Germain-Laval, Boen et Montbrison, comme le proposaient les élus montbrisonnais...Après moult soucis, de financements notamment (un gouffre pour les finances du département mais d'une utilité immense disait le Conseil général), elle fut achevée en 1832. La circulation entre Saint-Etienne et Annonay fut ouverte le 1er août de cette année et une voiture publique fit le trajet entre les deux villes. Les malles-poste de Paris à Marseille y passèrent à partir de 1835... A l'origine, elle portait le n° 100. Avec le reclassement des routes royales sous Louis-Philippe, elle prit le n°82.
"La Route Bleue permet au touriste de découvrir, avec étonnement et enchantement, ce coin de France trop peu connu. (...) N'oublions pas que la Route bleue n'est pas seulement la plus pittoresque, elle est aussi la route gastronomique par excellence... " Léon Vermeillet, Président du Comité local de la Route Bleue, in "Loire - les documents de France" (années 50)
La corvée
Il est dit qu'à Gathelière, on pouvait voir autrefois à l'entrée d'un champ, sur la droite de la grande route, sur le chemin du tunnel et la maison Fournier-Coquard, deux pierres plates d'environ un mètre de hauteur dont l'une portait écrit en gros caractères le mot "Pingus" et l'autre "Sail les Châteaumorand". Deux autres étaient à l'entrée de la cure et d'autres encore portant le nom d'une paroisse étaient plantées de distance en distance tout au long du grand chemin de Paris entre Lyon et la croix Gathelière. Ces pierres marquaient les limites entre lesquelles devaient travailler à la corvée de la route, bien malgré elles, les communautés avoisinantes. Les corvéables, arrachés à leur terre, devaient travailler quatre fois l'an et trois jours chaque fois au "chemin du Roi". La corvée, honnie, fut abolie en 1776, puis rétablie. Avant d'être emportée par le vent révolutionnaire...
L'Hopital sur Rhins, la route de Lyon
Le déclin
La fin du XVIIIe siècle marqua le déclin de la route du Bourbonnais au profit de celle de la Bourgogne. Sous Napoléon, elle devint par décret du 16 décembre 1811 la Route Impériale de première classe n°8 de Paris à Rome. On sait que Napoléon Ier s'arrêta à la Pacaudière à plusieurs reprises, notamment en janvier 1802 au retour de Lyon et en juillet 1805 au retour d'Italie. On dit qu'il fit une courte halte au relais de Changy. Il passa encore en 1814 lors de son départ vers l'île d'Elbe, sans pouvoir faire ses adieux à sa mère Laeticia et son oncle le cardinal archevêque de Lyon Joseph Fesch, réfugié alors au monastère de Pradines. Après Waterloo, la route vit passer les troupes autrichiennes.
A la fin de l'Empire, la montée de Tarare est remplacée par une route en lacets s'élevant à flanc de coteau, avec des virages serrés, un tracé correspondant exactement à celui de la N7. Un chantier de 8 km est ouvert au roulage en 1820. Le pont de pierre de Roanne est achevé en 1834. Peu après 1836, le tracé entre la Palisse et Saint-Martin d'Estréaux est modifié: la route de Droiturier est abandonnée, on passe par Les Chevreaux et les Espalus. Des amélioration sont apportées au nord de la Pacaudière jusqu'à la Gauthière.
Le percement du tunnel de Saint-Martin (1380 mètres de longueur) accompagne la réalisation de la ligne de chemin de fer Andrézieux-Roanne le Coteau et son prolongement vers le Beaujolais. Ces liaisons achevèrent la batellerie sur la Loire et la route du Bourbonnais. L'un après l'autre, les relais de poste ferment. Il n'y en a plus en 1870. Les étapes de diligences deviennent parfois des gares de chemin de fer.
Les guerres
Au commencement de la Première Guerre mondiale, l'armée française ne dispose que 6000 véhicules. C'est donc par chemin de fer que s'effectue la mobilisation. Le 2 août 1914, toutes les cloches du pays sonnent. A la Pacaudière, toute la population du canton se retrouve dans la rue nationale où le garde champêtre, après un roulement de tambour, a lu l'ordre de mobilisation. La jeunesse lance des couplets patriotiques, quitte les foyers et se retrouve sur la N7 en direction de la gare où, de jour en jour, s'échelonnent les départs. La Nationale voit aussi passer les chevaux, réquisitionnés par l'armée. Dès 1920, l'état des routes s'améliore considérablement. Elles sont jalonnées par les bornes Michelin. Les premiers guides routiers datent quant à eux de 1900. Le réseau d'autocars se développe. Le 2 septembre 1939, rebelotte. C'est à nouveau l'ordre de mobilisation. La N7 est à nouveau très encombrée. L'exode n'arrange rien. A Changy, la route, encombrée, donne un spectacle de foire. Le 19 juin 1940, à 14h30, une avant-garde allemande traverse Changy et les autres villages, suivie des troupes motorisées.
Les fêtes de la Route Bleue à Saint-Etienne. L'année nous est inconnue. Vraisemblablement dans la première moitié des années 30 "au moment où se dessine un mouvement très vif en faveur de la renaissance du tourisme en France, où Saint-Etienne, par sa situation, doit devenir la clef touristique des Cévennes..." Elles se déroulèrent en présence de Miss Paris, de la Reine de la Route Bleue (Andrée Descours) et Miss Pilat. Le président du Comité de la Route Bleue était alors M. Boncourt. Ces festivités coincidaient avec l'inauguration du pavillon du Syndicat d'initiative.
Le 1er Tour
N'oublions pas que le premier tracé du Tour de France emprunta la N7. 80 coureurs participèrent à la course remportée dans sa première étape, entre Paris et Lyon via Nevers, Moulins et Roanne, par Maurice Garin.
Le printemps
Avec les congés payés, la route devient plus touristique. Le soleil du midi attire les nordistes et l'on assiste alors à une explosion de restaurants, d'auberges, de stations services... Le terme de "Bouchon" promis à un bel avenir s'applique alors surtout aux célèbres embouteillages de Nevers et Moulins. On connaît pas ou peu les déviations et longue semble la traversée des faubourgs de Moulins, sans les platanes qui ombrageaient la route plus au nord. Heureusement, il y a la TSF et Trenet qui chante "Nationale 7". Un parcours sinueux de 15 km après La Palisse où le Château de Jacques de Chabannes surplombe majestueusement la ville, nous permet d'admirer les vertes montagnes de la Madeleine. Franchis les contreforts, on passe par le centre du village de St Martin d'Estréaux où l'on peut voir l'ancien relais et de belles demeures. Sur la place de l'église se trouve le célèbre monument aux morts pacifiste. Et nous voilà à La Pacaudière, halte obligée où l'on profite des terrasses des cafés et de la bonne cuisine de l'auberge du Lys, où l'on admire à droite et à gauche le Petit Louvre et la Maison Notre Dame.
La place de La Pacaudière se confondait avec la N7. Jusqu'en 1949, date à laquelle fut construit le mur de soutènement surmonté d'une balustrade moderne, elle s'ouvrait sur la route, se montrant comme une grande esplanade. Coeur de la cité, s'y trouvait aussi autrefois l'Hostellerie des trois César. L'Hôtel Notre-Dame et sa façade ornée de deux anges était renommé pour sa gastronomie et a laissé des souvenirs émus et reconnaissants aux gourmets qui s'y arrêtaient. En 1630 déjà , un voyageur notait: "Enfin, nous arrivâmes à La Pacaudière... nous fîmes préparer un dîner composé d'excellents poissons à l'image de Notre Dame." Un nommé Leverdis écrivait avec enthousiasme: "J'arrivais à La Pacaudière, à l'hôtellerie de l'Ange où me fut envoyé un bon ange qui m'y traita magnifiquement." Au sud de la place, la maison Morin, la plus ancienne du bourg (1420) a gardé de belles fenêtres gothiques et c'est là que se situait le guichet de péage supprimé en 1794. Depuis le XVe siècle, baladins, montreurs d'ours et acrobates s'y retrouvaient.
" Saint-Etienne doit être considérée comme l'une des plus curieuses par la caractère de ses habitants", lisons-nous dans le guide de 1951. A ses origines, au XIXe, le tracé empruntait à Saint-Etienne la route d'Annonay dans sa partie sud et la route de Roanne dans sa partie nord. La route d'Annonay devint la rue du même nom, puis du Onze novembre après 1919. La route de Roanne troqua son nom pour celui de rue de Roanne puis rue de la Préfecture.
"Saint-Etienne, relais principal des voyageurs pressés et des touristes en vacance."
Tel un ruban...
Si l'on est curieux, on n'oublie pas de flâner dans les ruelles du magnifique village médiéval du Crozet et de se recueillir près de la Vierge de Tourzy, avant de poursuivre sa route vers le soleil. La N7 se faufile tel un ruban vers Changy, ce "village rue" dont les habitants profitent soit de la bonne humeur, soit de l'exaspération des vacanciers. Le village de Saint-Forgeux-Lespinasse se cache un peu de la route et la ligne droite est bien tentante: appuyer sur le "champignon" jusqu'à Saint-Germain-Lespinasse, mais la Maréchaussée veille ! Le voyage se poursuit jusqu'à Roanne. La traversée Roanne/Le Coteau reste gravée dans la mémoire des touristes avant la déviation tant attendue. La Nationale 7 arrivait par la route de Paris, tournait rue Alexandre Roche, se dirigeait vers la rue du lycée (Charles de Gaulle) en direction du carrefour helvétique, se poursuivait dans la rue Jaurès jusqu'au pont de la Loire en direction du Coteau.
Cependant, le voyageur averti, n'hésitait pas à faire un détour en face de la gare où Jean-Baptiste et Marie Troisgros s'installèrent en 1930 à l'Hôtel des Platanes, rebaptisé Hôtel Moderne. Ce n'était qu'un lieu de passage pour les représentants du commerce et la clientèle locale. Autour d'une table d'hôtes conviviale, ceux-ci appréciaient la bonne cuisine de Marie et les bons vins de Jean-Baptiste...
Archives municipales de Changy
Le tourisme dans notre canton
Riche d'histoire, il ne rate pas le coche et crée un syndicat d'initiative à La Pacaudière et assure la promotion de la région en s'installant judicieusement dans la belle demeure du Petit Louvre. On y découvre l'histoire locale, les sites géographiques, l'offre sportive, gastronomique, les animations... Le commerce aussi se développa considérablement: épiceries, ventes de produits régionaux... Mais trop de voitures, trop d'accidents, trop de danger transforment aussi les villages en autant de points noirs invivables. Et l'on parle déjà de déviation dans les années 50 ! On est loin du marché aux petits cochons de 1893 à Changy !
Publicité dans le guide de la Route bleue.