

Les données biographiques que nous utilisons nous ont été communiquées par André Piégay, responsable de "l'Association des Amis de Jean Pralong". Forte de 60 membres (des anciens syndicalistes pour la plupart), elle s'est donnée pour but de transmettre aux jeunes générations le passé syndical, son histoire et ses luttes et en particulier l'activité et les idées de Jean Pralong. Un autre groupe travaille sur les problèmes de santé dans la région stéphanoise. Comme nous le verrons, l' action syndicale et l'action sociale furent en effet deux grands axes de l'engagement de Jean Pralong, son rôle au sein de la C.F.T.C et dans l'administration de la C.P.A.M ont été de premier ordre. Ceci explique que l'inauguration récente de la " rue Jean Pralong " (par le maire de Saint-Etienne en octobre 2005) aurait dû logiquement se doubler dans la Loire de la commémoration du 60ème anniversaire de la Sécurité Sociale ; ce qui finalement ne s'est pas fait. Nous utilisons également les données du livre 150 ans de luttes ouvrières dans le bassin stéphanois de P. Héritier, R. Bonnevialle, J. Ion et C. Saint-Sernin, publié en 1979.
Jean Pralong nait le 16 mai 1899, en Haute-Loire, près de Retournac, dans une famille paysanne et très catholique. A propos de la Foi alliée à ses engagements politiques il devait dire plus tard: "La foi est une force, un dynamisme qui élève l'esprit. Et l'Esprit c'est Dieu ; mais ce n'est pas à crier à tout bout de champ ! La prière est utile dans les moments difficiles parce que l'action ne donne pas toujours des satisfactions ! Nous nous situions dans la ligne de Buchez, de Lamennais, de Marc Sangnier et du Sillon qui voient dans Jésus-Christ le premier socialiste et un compagnon de route pour les luttes actuelles. Du reste le « Magnificat » est un chant de révolte : « le Puissant chasse les riches les mains vides, il rappelle les pauvres. "
Jean Pralong nait le 16 mai 1899, en Haute-Loire, près de Retournac, dans une famille paysanne et très catholique. A propos de la Foi alliée à ses engagements politiques il devait dire plus tard: "La foi est une force, un dynamisme qui élève l'esprit. Et l'Esprit c'est Dieu ; mais ce n'est pas à crier à tout bout de champ ! La prière est utile dans les moments difficiles parce que l'action ne donne pas toujours des satisfactions ! Nous nous situions dans la ligne de Buchez, de Lamennais, de Marc Sangnier et du Sillon qui voient dans Jésus-Christ le premier socialiste et un compagnon de route pour les luttes actuelles. Du reste le « Magnificat » est un chant de révolte : « le Puissant chasse les riches les mains vides, il rappelle les pauvres. "
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Il vient au monde avec une main atrophiée qui plus tard, en 1915, l'empêchera d'intégrer l'Ecole Normale de Montbrison. Toute la famille vient s'installer en 1900 à Saint-Etienne où le père, comme beaucoup d'autres Vellaves, travaille dans la métallurgie, notamment à la Manu. La famille vit rue du Treuil (Salengro aujourd'hui), dans le très populaire et populeux quartier du Crêt de Roch. Ne pouvant pas devenir instituteur, à 16 ans il entre dans une société d'Assurance privée, la Société Bory-Laval au sein de laquelle il va travailler durant 31 ans. En parallèle de son travail, il étudiera le Droit jusqu'à devenir une « encyclopédie » dans ce domaine mais sa culture s'étendait à bien d'autres domaines.
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L'année 1919 marque véritablement le début de son engagement politique et syndical. Il intègre la « Jeune République » fondée par Marc Sangnier ( "mon maître au point de vue politique" a écrit Pralong) en 1912, une ligue (plus qu'un parti, tout du moins à ses débuts) qui incarne l'aile gauche de la démocratie chrétienne et qui milite pour la paix entre les nations, surtout entre la France et l'Allemagne, dans l'entre-deux guerres. Dans la Loire, l'implantation de la Jeune République est antérieure à la guerre de 14-18. Un cercle existe alors dans la vallée du Gier, animé par La Sablière. En 1920, un congrès départemental est présidé à Saint-Chamond par Marc Sangnier en personne puis la Jeune République se répand dans tout le département: Saint-Etienne, l'Ondaine, le Pilat, la plaine, les Monts du Lyonnais et du Forez... Son influence s'exerça surtout sur les militants de la CFTC; seuls quelques maires J.R. furent élus dont Marchand à Sury-le-Comtal. En 1926, Pralong et son « filleul » Eloi Thiollière participent aux « Congrès de la Paix ».
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.Congrès démocratique international de Bierville en 1926. Au centre, portant cravate et moustaches, Marc Sangnier. Assis et pieds nus, Eloi Thiollière; surligné d'une croix blanche, Jean Pralong. Image extraite de 150 ans de luttes ouvrières dans le bassin stéphanois.
Cette même année, Pralong crée avec Magand et Jean Marie Brun le premier syndicat CFTC/Loire (Confédération Française des Travailleurs Chrétiens) qui regroupe les travailleurs chrétiens qui, pour l'heure, n'appartiennent pas au monde ouvrier (la CGT, elle, existe depuis 1895) mais regroupe des employés de banque, du commerce, des assurances... Trois ans plus tard, il devient le secrétaire de l'Union Départemental (UD) masculine des Syndicats CFTC de la Loire. Il le restera jusqu'en 1934 puis accèdera au poste de président jusqu'en 1936. Pralong, durant toute son activité syndicale, n'a eu de cesse de prôner l'unité dans l'action et la démocratie dans l'entreprise.
A partir de 1925, Jean Pralong s'engage également dans l'action sociale proprement dite, « pour des conditions d'existence meilleures pour tous » à une époque où les assurances sociales n'existent pas encore (1930). Depuis 1898, la loi autorisait la création de sociétés libres et donnait à la mutualité la possibilité de créer des caisses autonomes (privées) qui pouvaient couvrir les champs d'activité de la protection sociale : assurance-vie, assurance-invalidité, retraite... Il fonde alors la « Mutuelle Syndicale », renommée plus tard « l' Entraide familiale ». En 1930, dès l'instauration des assurances sociales, il devient administrateur de la Caisse Départementale des Assurances de la Loire (publique). En 1933, il fonde et administre le Foyer Populaire de Valbenoite qui offre la restauration et le logis aux jeunes travailleurs.
A partir de 1925, Jean Pralong s'engage également dans l'action sociale proprement dite, « pour des conditions d'existence meilleures pour tous » à une époque où les assurances sociales n'existent pas encore (1930). Depuis 1898, la loi autorisait la création de sociétés libres et donnait à la mutualité la possibilité de créer des caisses autonomes (privées) qui pouvaient couvrir les champs d'activité de la protection sociale : assurance-vie, assurance-invalidité, retraite... Il fonde alors la « Mutuelle Syndicale », renommée plus tard « l' Entraide familiale ». En 1930, dès l'instauration des assurances sociales, il devient administrateur de la Caisse Départementale des Assurances de la Loire (publique). En 1933, il fonde et administre le Foyer Populaire de Valbenoite qui offre la restauration et le logis aux jeunes travailleurs.
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En 1965, Pralong (à la retraite depuis 1959) crée l'Union des retraités CFDT de la Loire dont il assura la présidence jusqu'en 1980.
Pendant la guerre, la CFTC entre dans la clandestinité après la dissolution des syndicats par le régime de Vichy. Pralong, qui occupe alors des fonctions importantes aux Conseil des Prud'Hommes (il est le plus jeune conseiller de France), rejoint d'autres militants dans la Résistance, au sein des organisations « Combat » et « Franc-Tireur » : Florent Badiou, Jean-Marie Brun, Eloi Chacornac... En 1943, il échappe à la rafle de la rue Basse-de-Rive qui décime une partie de la direction de la Résistance forézienne.
A la Libération, la loi du 4 octobre 1945 institue la Sécurité sociale. Entre 1947 et 1980, il est administrateur de la CPAM (Caisse Primaire d'Assurance Maladie) de Saint-Etienne-Montbrison. Pralong est aussi administrateur honoraire du Centre Hospitalier Régional et Universitaire. Il est (en 1945), Président Général des Prud'hommes. Enfin, il est Conseiller général de Saint-Héand ! Un conseiller éphémère : il ne fut pas réélu, s'étant prononcé contre la loi de subventions aux écoles privées.
Au niveau de la CFTC, Pralong prit position pour un socialisme démocratique et oeuvra pour une évolution du syndicat vers la CFDT (la Confédération Française Démocratique du Travail.) La CFTC, qui s'affirmait chrétienne dès ses débuts, fut confrontée après-guerre à la déconfessionnalisation d'une partie de ses militants. De fait, la CFDT, dont les figures nationales prennent soin de souligner qu'elle n'est pas marxiste, est créée les 6 et 7 novembre 1964. "Et si, dans la Loire, le tournant s'est fait sans grand heurt, il n'est pas exagéré de dire que c'est en grande partie grace à Jean Pralong qui a su rassurer et entraîner les plus réticents." (cf 150 ans de luttes ouvrières dans le bassin stéphanois).
A la Libération, la loi du 4 octobre 1945 institue la Sécurité sociale. Entre 1947 et 1980, il est administrateur de la CPAM (Caisse Primaire d'Assurance Maladie) de Saint-Etienne-Montbrison. Pralong est aussi administrateur honoraire du Centre Hospitalier Régional et Universitaire. Il est (en 1945), Président Général des Prud'hommes. Enfin, il est Conseiller général de Saint-Héand ! Un conseiller éphémère : il ne fut pas réélu, s'étant prononcé contre la loi de subventions aux écoles privées.
Au niveau de la CFTC, Pralong prit position pour un socialisme démocratique et oeuvra pour une évolution du syndicat vers la CFDT (la Confédération Française Démocratique du Travail.) La CFTC, qui s'affirmait chrétienne dès ses débuts, fut confrontée après-guerre à la déconfessionnalisation d'une partie de ses militants. De fait, la CFDT, dont les figures nationales prennent soin de souligner qu'elle n'est pas marxiste, est créée les 6 et 7 novembre 1964. "Et si, dans la Loire, le tournant s'est fait sans grand heurt, il n'est pas exagéré de dire que c'est en grande partie grace à Jean Pralong qui a su rassurer et entraîner les plus réticents." (cf 150 ans de luttes ouvrières dans le bassin stéphanois).
En 1965, Pralong (à la retraite depuis 1959) crée l'Union des retraités CFDT de la Loire dont il assura la présidence jusqu'en 1980.
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Jean Pralong a écrit plusieurs ouvrages. Notamment un livre consacré à La Charité (avec Y. Delomier). Ici les deux tomes de l'Histoire des luttes économiques, politiques et sociales de Saint-Etienne. Fruit d'une quinzaine d'années de recherches, l'ouvrage est inachevé. Jean Pralong: "C'est le dernier ouvrage que j'écris et que je laisse à la postérité. En l'écrivant, c'est mon testament politique et syndical que j'ai rédigé. Je serai probablement critiqué à droite et à gauche. En matière d'histoire, on ne peut pas être neutre, il faut savoir prendre parti si l'on veut construire l'avenir.Peu importe, je termine par cette devise qui fut celle du Sillon: ALLEZ AU VRAI AVEC TOUTE SON AME."
Toute cette débauche de fonctions occupées dans divers domaines d'activité ne doivent pas masquer la personnalité et les convictions profondes de l'homme. Le Socialisme qu'il professa toute sa vie fut un socialisme personnaliste ; il dénonça le cléricalisme, de droite comme de gauche tout en restant jusqu'à sa mort, fidèle à ses fortes convictions religieuses (150 ans de luttes ouvrières... parle d'une véritable "mystique"); il oeuvra à la paix entre les peuples ; prôna la Société au service de la Personne en même temps que l'indépendance du politique et du syndical, lui qui jongla toute sa vie entre politique et syndicalisme. André Piégay : "Pralong voulait que tout le monde travaille ensemble. Son leitmotiv, c'était vraiment l'Union dans l'Action. Sans dogmatisme. Il disait qu'il ne fallait pas cacher son drapeau dans sa poche, que chacun avait ses idées mais qu'on pouvait travailler quand même ensemble. Pour améliorer les conditions de travail ! Mais son grand domaine c'était vraiment la protection sociale. Il l'a prouvé."
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150 ans de luttes ouvrières dans le bassin stéphanois : "En face d'un magistrat, d'un immigré ou d'un jeune apprenti, sans aucune prévention pour quiconque, il est capable d'établir une relation profondément humaine : jamais démonté par aucune agressivité, rompu à toutes les négociations, il ne se laisse pas facilement prendre la parole. Dans les discussions les plus bloquées, devant les interlocuteurs les plus conservateurs, il montre une patience qui n'a d'égal que son entêtement à prendre toujours et en tout lieu le parti des travailleurs. Pralong est de cette génération de militants CFTC précis, compétents et déterminés, à vrai dire plus à l'aise dans les controverses juridiques que pour mener les foules ; mais il ajoute à ces qualités techniques un talent d'orateur bon enfant qui lui permet de conquérir les auditoires les plus variés."
Jean Pralong s'est éteint en 1992, à l'âge de 93 ans. Il repose à Saint-Etienne, au Crêt de Roc.
Notes :
- Avant la création de la CFTC en 1919, il existait déjà des syndicats chrétiens. Mais ceux-ci étaient dirigés en grande partie par des hommes d'église. La CFTC, animé par des laics, souhaitait s'affranchir de la mainmise ecclésiastique tout en voulant amener le travailleur chrétien vers le syndicalisme. L'Union Départementale des syndicats CFDT refusa la présence d'un aumônier. La CFTC n'est pas morte en 1964, le syndicat existe encore.
- Marc Sangnier, 1873 ' 1953 : Homme politique et journaliste parisien, fondateur (1894) de la revue Le Sillon, journal du mouvement pour un christianisme démocratique et social, et de l'hebdomadaire l'Eveil démocratique. Le mouvement s'organise derrière le mot d'ordre la "République démocratique", et tente de concilier le régime républicain au catholicisme. En 1910, le Pape condamne Le Sillon. Sangnier se soumet. En 1912, il fonde la Jeune République et lance le quotidien La Démocratie. Elu député en 1919, il lutte pour "l'internationale démocratique" et crée L'Eveil des peuples. Il milite alors pour la paix dans le monde. L'Irlande est donc pour Sangnier une cause idéale pour démontrer ses théories (contre l'oppression et la domination, pour le catholicisme, et la République). A côté des articles de ces revues et journaux, Sangnier a publié divers ouvrages et fait paraître les textes de ces discours. Marc Sangnier fut aussi le fondateur des Auberges de jeunesse.
- Marc Sangnier, 1873 ' 1953 : Homme politique et journaliste parisien, fondateur (1894) de la revue Le Sillon, journal du mouvement pour un christianisme démocratique et social, et de l'hebdomadaire l'Eveil démocratique. Le mouvement s'organise derrière le mot d'ordre la "République démocratique", et tente de concilier le régime républicain au catholicisme. En 1910, le Pape condamne Le Sillon. Sangnier se soumet. En 1912, il fonde la Jeune République et lance le quotidien La Démocratie. Elu député en 1919, il lutte pour "l'internationale démocratique" et crée L'Eveil des peuples. Il milite alors pour la paix dans le monde. L'Irlande est donc pour Sangnier une cause idéale pour démontrer ses théories (contre l'oppression et la domination, pour le catholicisme, et la République). A côté des articles de ces revues et journaux, Sangnier a publié divers ouvrages et fait paraître les textes de ces discours. Marc Sangnier fut aussi le fondateur des Auberges de jeunesse.
- Eloi Thiollière : Cousin éloigné du maire actuel, il fut un peu, pour reprendre l'expression de Mr Piégay, le « filleul spirituel » de Pralong. Il participa à l'aventure de la « Jeune République ». Ouvrier-ajusteur, il étudia les langues (il lisait et écrivait plusieurs langues dont l'Esperanto), la géographie, l'Histoire... Il écrivit ainsi de nombreux articles dans le Bulletin des Amis du Vieux Saint-Etienne entre 1945 et 1955. En 1930, il créa une caisse privée d'assurance sociale qui tenait ses locaux à la Bourse du Travail. En 1946, il intégra la Sécu comme sous-directeur à la caisse de Saint-Etienne. Il termina sa carrière comme directeur-adjoint. Il est décédé en 2003, dans sa centième année. Le syndicalisme conserve bien, semble-t-il.
- Florent Badiou : Proche camarade de Pralong ; créateur d'une section CFTC au sein d' EDF ; également « jeune République » et compagnon de résistance.